C'est l'histoire...
Dans les plaines arides, sous un soleil de plomb, la brûlure sous les pieds nus du Voyageur avait de quoi décourager. Cela faisait des jours et des nuits qu'il arpentait les sols de terre sèche en quête d'oasis où étancher sa soif d'eau et d'ombre. Il portait pour seul vêtement un long tissu beige et brun qui seyait à ses épaules en une capuche large qui, s'il la faisait couvrir sa longue chevelure fatiguée, descendait jusqu'à ses yeux. Son regard était presque mort et dans ses pupilles lasses on pouvait trouver les récits des derniers jours mornes et rudes qu'il venait de vivre. Le corps du Voyageur, alourdi par le poids de sa condition humaine, s'effondra à genoux dans la terre qui l'accueillit à bras ouverts tandis que le ciel, dégagé de tout nuage, embrassait son visage levé vers lui dans un mouvement de désespoir. Le Voyageur, dans sa prière, ne versa aucune larmes, et sa voix ne fut prise d'aucun sanglots, il implora :

« Seigneur, libérez-moi, cette quête absurde j'en suis las. »

Le Seigneur ne lui apporta aucune rédemption, et quand bien-même il aurait entendu sa prière, le Voyageur savait au fond de lui-même que cette profonde solitude, s'il ne la méritait, il la lui fallait. Sans se l'expliquer, il savait que sa place était là, à pratiquement mourir sous le regard bienveillant d'un astre qui le desséchait, avec pour seule conviction sa foi.

Après plusieurs heures, le corps à l'abandon et l'esprit à la dérive, le Voyageur songea que son heure était venue. Au moment précis où il abandonna toute lutte, lorsque tout combat était devenu vain et qu'il accueillit la mort en son sein, un être se présenta derrière lui : un corps de chair et d'eau qu'on aurait appelé une femme si elle n'avait pas tant l'air d'un ange. Ses longs cheveux aux couleurs des flammes et du crépuscule cascadaient autour de son visage qui portait des lumières sereines. Le Voyageur, qui avait fermé les yeux jusque là, les ouvrit soudain, lorsque la voix, telle une brise sur sa nuque, s'éleva dans son dos. Les mots prononcés l'étaient dans une langue qu'il ne connaissait pas, pourtant, il pouvait distinguer avec exactitude le message qui traversa tout son corps.

« Ais confiance, vis. »

Le Voyageur se leva, et si la douleur était toujours là, elle n'était plus un frein, car il n'avait plus peur. Il continua son chemin, l'âme brave, sans plus de frayeur. Les fébrilités qui l'avaient ralenti jusque là s'étaient tout à coup évaporées, dissipées par la seule voix qui l'avait relevé de sa chute d'Homme.

Désormais, tomber n'était plus un problème. Il tomberait, et elle serait là : là où la douleur immense prendrait son corps pour l'anesthésier de tout le reste, elle le regarderait mourir et lui dirait :

« Je te vois. »

Ainsi le Voyageur, même s'il tomba encore, n'eut plus jamais peur, et put marcher jusqu'aux oasis du bonheur, où il la retrouvera, il en était sûr,

Gwendavyre, à la chevelure du crépuscule ; l'ange béni des Voyageurs de l'âme.